tribuddy a écrit :
Ribéry continue son bonhomme de chemin vers le ballon d'or FIFA: on lui a dit de marquer au moins un but tous les deux matches jusqu'à la période de vote, ce qu'il fait. Bon timing pour lui, Messi est blessé. Le Bayern pousse pour qu'il ait cette récompense, l'Allemagne le soutient, Adidas bien implanté à l'UEFA l'avait bien pistonné pour obtenir le titre de joueur UEFA de l'année.
Finalement l'endroit où il est le moins soutenu reste... la France.
Très bon papier de Bégaudeau:
La fabrique de la star
LE MONDE SPORT ET FORME | 04.10.2013 à 14h06 • Mis à jour le 04.10.2013 à 15h08 |
François Bégaudeau
http://www.lemonde.fr/sport/article/201 ... _3242.html
"De même que ce ne sont pas forcément les meilleurs acteurs qui accèdent au rang de star, un champion ne devient pas une star du sport sur la seule foi de ses compétences dans sa discipline. Le sportif star est une création collective fondée en grande partie sur des critères parasportifs, la plupart moraux.
C'est ce qui plombe Ribéry, promis au statut de star à ses débuts, avant que ne survienne Zahia, puis Knysna, puis son supposé comportement de caïd chez les Bleus, puis son refus de jouer côté droit contre les intérêts de l'équipe, etc. A partir de là c'était foutu, et c'est avec une indifférence aigre que la France a regardé son ex-chouchou recevoir un titre de joueur UEFA de l'année qui eût dû la remplir de fierté.
Désormais tout se retourne contre lui. Au lieu de l'absoudre, ses performances avec le grand Bayern sont mises en regard avec ses prestations moins convaincantes en sélection nationale, le parallèle faisant germer un soupçon d'irrespect pour le maillot bleu et d'ingratitude vis-à-vis de sa terre nourricière. Les deux buts sauveurs contre la Biélorussie n'y changeront rien. Rien n'y changera rien. Elu Ballon d'or ou meilleur footballeur du système solaire, Ribéry ne déridera pas une France campée sur ses principes.
DES LIMITES AU PAYS DE L'UNIVERSEL
Campée sur ses principes ? A voir. Pendant dix ans la France a quasiment ignoré qu'elle avait élevé en son sein l'un des meilleurs basketteurs du monde, l'un des plus grands sportifs français de tous les temps. Or, en l'occurrence, la butée n'était pas morale. Que reprocher à ce joueur qui, bien que parti tôt vers la NBA comme tant d'autres, donnait tous ses étés à l'équipe de France, s'y comportait en seigneur, investissait dans le club de Villeurbanne ? Deux choses, on lui reprochait : Tony et Parker. Ce champion-là sonnait trop yankee. Né en Belgique, mère hollandaise, père américain naturalisé, faut pas pousser. Nous constatons chaque année davantage que la France est le pays de l'universel dans certaines limites. Dans les limites d'une Europe qui ne comprendrait pas la Roumanie et ses persécutés qui migrent vers ici en BMW. En tout cas, nous en étions là jusqu'à ce que Parker batte l'Espagne tout seul, et permette aux siens de finir le boulot en finale des championnats d'Europe. Ça change tout. S'il voulait bien se rebaptiser Antoine Parquier, il entrerait dans les cinq premiers du sondage de popularité du Journal du dimanche.
Il faut donc corriger le propos liminaire. Le critère sportif demeure prévalent dans la construction sociale de la star. En sport, le bavardage moral s'arrête là où commencent les résultats. Zidane pourra encore être entendu dix fois par les juges dans le cadre d'affaires italiennes de dopage, continuer à engranger des millions sur son image, être l'ambassadeur généreusement arrosé d'un Mondial au Qatar dont la farce est en train de tourner vinaigre (40 esclaves morts sur les chantiers de stades), il aura toujours pour lui, outre son immense talent, d'avoir mis deux buts un certain soir de juillet 1998. Ribéry sait ce qui lui reste à faire : en mettre deux à son tour pour crucifier le Brésil sur ses terres en finale du prochain Mondial. C'est bien ce qu'on disait : c'est foutu."